Jebel Irhoud et l’origine d’Homo sapiens
par Jean-Jacques Hublin
Les données de la génétique et de la paléontologie humaine ont établi, dès les années 1980, les origines africaines de l’humanité moderne. Les populations archaïques (hommes de Neandertal, dénisoviens,…) qui peuplaient encore l’Eurasie il y 40 000 ans ont été remplacées ou en partie absorbées par des groupes humains anatomiquement modernes. L’origine géographique et les modalités d’évolution de ces hommes ont fait l’objet de nombreux débats. Longtemps, une origine sub-saharienne, et plus particulièrement est-africaine, a été privilégiée par les spécialistes. Les découvertes réalisées au Maroc, dans le site archéologique de Jebel Irhoud ont bouleversé ces conceptions. Cette grotte habitée par les hommes il y a 300 000 ans a livré les restes fragmentaires d’au moins 5 individus dont l’analyse, publiée en juin 2017 dans la revue Nature, révèle qu’ils appartenaient à une forme primitive d’Homo sapiens directement ancestrale des hommes modernes. Ils sont associés à des outillages de pierre taillée et des restes d’animaux chassés qui font de Jebel Irhoud le site africain le plus riche et le plus ancien qui documente une phase critique de l’évolution humaine: celle de l’apparition de notre propre espèce.